A l’heure actuelle, en Wallonie, 40 fermes disparaissent par semaine. En 50 années de Politique Agricole Commune, 80 % des paysans européens ont disparu. Et pourtant, nous sommes 7 milliards, bientôt 9 en 2050, de bouches à nourrir. Quel avenir pour notre agriculture ? Quelle consommation construisons-nous aujourd’hui, pour les générations futures ?
C’est à ces réalités et questions douloureuses que la Compagnie Art et tça nous oppose. Car nous voilà bientôt confrontés à la parole directe et sans fioriture des agriculteurs, rencontrés dans leur cuisine, leurs étables, leurs fermes. Qui expliquent : comment leur travail a évolué, comment les cadences se sont accélérées, comment il a fallu avaler son voisin pour survivre, toujours s’étendre, sacrifier la qualité pour intensifier la production. Comment ils ont oublié le travail de la terre, comment ils en arrivent à avoir honte du travail produit par ce métier qui est pourtant l’un des plus beaux du monde : nourrir l’humanité…
Dans un dispositif original, Charles Culot et Valérie Gimenez incarnent de manière sobre, sensible et délicate certains des personnages qu’ils ont rencontrés, afin de mieux transcrire leurs convictions, leur détresse et leurs espoirs. Les vidéos d’autres portaits viennent renforcer le message militant, porté avec les tripes par les deux artistes engagés et convaincus. Car au-delà de la performance artistique, c’est à un exercice d’éducation populaire et d’éveil citoyen que se livrent les deux comédiens ; leurs réflexions questionnent notre engagement personnel et collectif quant à la définition de notre avenir commun et la réappropriation de nos choix de vie, que la société capitaliste tend à nous ôter, en uniformisant à la fois la demande (le monde entier mange des Kelloggs au petit déjeuner) et l’offre (l’intensification de la production tend, de par sa nature concurrentielle, à devenir unique).
On ne peut s’empêcher de penser à Raymond Depardon, à Rural de Davodeau, ou encore à des films comme Le monde selon Monsanto ou encore Le cauchemar de Darwin. Ce théâtre documentaire élégant et touchant parvient tout à la fois à légitimer la nécessité du théâtre « porteur de sens » et du rôle de l’artiste citoyen « éveilleur de conscience ». Il soulève des questions dérangeantes qui ont souvent bien du mal à être portées par d’autres médias tant leur conclusion est sans appel : nous sommes en danger, et le néo-libéralisme sauvage qui s’instaure comme modèle dans notre société nous conduit dans le mur un poil plus vite encore. Réagissons. Vite.
Nourrir l’humanité c’est un métier
Du 27/01 au 01/02/2015 au Théâtre National
Durée : 1h20
Tarifs : de 8,50€ à 19€
Conception, écriture et interprétation Charles Culot et Valérie Gimenez
Ecriture et mise en scène Alexis Garcia
Conseiller artistique Jos Verbist
Assistant à la mise en scène Camille Grange
Costumière Annabelle Locks
Assistante costumière Elsa Degraef
Plus d’informations sur le site du Théâtre National et la Compagnie Art et tça